Les électeurs sont des gens simples. Ils veulent des promesses. Qu'un homme ou une femme providentielle les fasse rêver. Peu importe la grossièreté du discours. Plus la propagande est invraisemblable, et mieux cela passe, tant c'est avant tout leur désir de ne rien faire et de ne rien être eux-mêmes, leur désir de croire aux promesses d'un(e) autre qui pousse les électeurs à faire d'un(e) politicien(ne) un(e) candidat(e).
Les citoyens d'extrême droite s'illusionnent sur eux-mêmes tout autant que les citoyens de "l'UMPS"qu'ils aiment tant moquer. Ils dorment, et Marine Le Pen est le nom d'un de ces pauvres rêves qui leur permet de continuer à dormir. Le caractère de "parti maudit" du FN a longtemps contribué à renforcer les illusions de ses adhérents. Entre autre, ceux-ci se rêvent complaisamment en "anticapitalistes". Ils sont braves. (Mais on ne peut vraiment leur en vouloir: après tout, les électeurs de gauche aussi se rêvent aisément en anticapitalistes).
Et quand on leur parle de mondialisation, ils se plaisent à s'imaginer que leur pauvre nationalisme, qui a historiquement contribué à la marchandisation du monde et à la marchandisation des hommes, pourrait y faire quelque chose. Mais si des électeurs étaient capables d'une pensée historique, il y a longtemps qu'ils ne seraient plus électeurs.
Effectivement, le FN fait un gros travail pour se "respectabiliser". Depuis quelques temps, ses colleurs d'affiches évitent de descendre des français trop noirs à leur goût. Ses manifestants parviennent à se retenir de jeter des maghrébins dans la Seine. C'est dire si c'est devenu un parti respectable.
Dans le même temps, la droite a appris à gagner avec les idées de la droite extrême. Les rêves des citoyens français sont de plus en plus sordides. Il leur faut ouvertement faire cauchemarder les plus faibles pour se rassurer. A commencer par les immigrés et tous les relégués des banlieues françaises. Dans ce contexte, les vies originaires du Maghreb ne pèsent pas lourd dans les songes citoyens. Il faut dire qu'elles n'ont jamais pesé lourd dans la république française. Même quand celle-ci les a broyé par centaines, elle a continué son chemin sans broncher, sans états d'âmes.
Par ailleurs, je ne sais rien de plus bête et abêtissant que ces propos tenus par la droite actuelle pour se défendre dans l'affaire Bettencourt - qui prétendent que la gauche en l'exploitant "ferait le jeu de l'extrême droite", et qu'il vaudrait mieux taire les saloperies du Pouvoir.
Si l'intention de l'UMP était de se changer en idiots utiles du FN, et de chanter "tête haute, mains propres" pour lui, eh! bien, c'est réussi.
C'était peut-être vraiment leur intention.
@jouté
ton ajout sur le nationalisme me paraît plus qu'ambigu.
Au fait; je ne sais pas si tu as remarqué, mais je n'ai pas cherché à répondre à ta question.
Parce que les liens que tu évoques me semblent appartenir pour l'essentiel au passé (ainsi qu'appartient au passé l'avenir de la droite extrême, qui n'a pu il y a 80 ans acquérir son importance que par les liens noués avec un grand capital industriel alors confronté à une main d'oeuvre sérieusement décidée à renâcler)
Le "grand capital" n'a plus besoin du flicage fascisant, de chemises brunes, de militarisation du travail. Il est aujourd'hui essentiellement financier. Son emprise est plus diffuse, et plus profonde. La soumission, il l'obtient à bien meilleur marché; par des moyens moins salissants.
La société de consommation n'est pas la société des années 30. La domestication des masses se passe aujourd'hui très bien du nationalisme. En fait, elle s'en contrefout. Ce qui ne l'empêche pas de recourir à l'occasion à son concours.
Et nos petits fascisants retardent de soixante dix ans. Leur bric-à-brac idéologique fait de fragments de critiques sociale dévoyés et liés par le fétichisme national n'est pas à jour. A courir derrière l'électoralisme, ils pataugent depuis des décennies dans la politique politicienne, qui ne connaît de théorie que marchande, et ne sait pas penser historiquement. Ils ne pensent donc pas mieux que leurs concurrents. Ils ne savent toujours pas à quoi leur idéologie sordide a servi, à quoi elle ne servira plus.
Les rapports de force changent, les alliances se défont. Les idéologies pourrissent.
Et quand ils croient sincèrement récupérer de la subversion, c'est au contraire de la bonne vieille soumission qu'ils dérobent. Ils fantasment sur leur pauvre fétiche national pendant que le capitalisme financier qui se contrefout de tous les nationalismes est aujourd'hui le seul détenteur du pouvoir. Ces impuissants fantasment un Etat Fort qui tiendrait tête à la finance. Ils ont la naïveté de croire que l'on peut "faire de la politique" contre le capitalisme. Ce n'est pas de leur faute: ils prennent leur prétention à la subversion chez une gauche plus ou moins extrême qui charrie les mêmes illusions. Ils ont la naïveté de croire que leurs leaders ne sont payés par personne.
A croire qu'ils ne savent pas ce qu'est l'argent.
Pauvres petits citoyens. Pauvres petits électeurs.